Interview Saber Bensmaïn (sélectionneur U17) : « Nous avons une équipe capable de tenir tête aux meilleurs »
On va revenir un peu en arrière pour vous demander de nous dresser un bilan de tout ce que vous avez fait avec les U17 depuis votre nomination.
On a entamé notre travail en mars 2015 avec un plateau national qui a regroupé les sélections du centre, de l’est, de l’ouest et du sud. On a organisé un tournoi afin de dégager un premier noyau de 43 joueurs qui allaient constituer la sélection des U17. A cette époque, le championnat avait pris fin, on en a donc profité pour faire des présélections avec la programmation de cinq stages. De ces stages, on a sorti 18 joueurs avec lesquels nous travaillons depuis août 2015. Avec ce groupe, nous avons effectué seize stages avec une moyenne de cinq jours par stage. Ce n’est pas très suffisant pour être à 100% de nos possibilités. Ajouter à cela, le volume d’entraînement très faible de la majorité de nos clubs qui, à l’exception de l’ASMO et du PAC, s’entraînent trois fois par semaines.
Mais les Libyens ne sont pas mieux lotis avec la situation de leur pays, non ?
C’est vrai, mais sur un match tout peut arriver. Et puis, nous nous sommes qualifiés jusqu’à preuve du contraire et nous sommes toujours là grâce justement au travail effectué et à la volonté des joueurs. Quand on revoit les deux matchs, on se rend compte que les Libyens ne nous étaient pas supérieurs. Il faut juste revoir leurs buts pour se rendre compte que nous leur avons offert au moins deux buts sur les trois qu’on a encaissés. Au match retour, on était obligés de gagner sans trop nous soucier de la manière parce qu’il s’agit de matchs à élimination directe. Si vous revoyez les matchs, vous allez vous rendre compte que nous leur avons marqué sur balles arrêtées. C’est un travail qu’on a réalisé à l’entraînement parce qu’on savait qu’ils avaient des insuffisances dans ce domaine. Il ne faut pas accabler cette jeune équipe car sur un match tout peut se passer.
L’équipe a pourtant présenté un bon visage lors des matchs amicaux du Maroc. Comment expliquez-vous cela ?
Parce que c’était justement des matchs amicaux avec un contexte complètement différent. Dans un match amical, il y a toujours une marge d’erreur parce que ce genre de rencontres doit nous servir pour améliorer notre jeu. C’est d’ailleurs ce qu’on avait dit aux joueurs : je préfère me tromper dans un match amical que dans un match officiel. Déjà sous pression avant la double confrontation à élimination directe face à la Lybie, les joueurs ont été touchés par certains clubs du championnat pour signer des contrats. Leurs parents n’attendaient que la fin du match retour pour prendre leurs enfants et aller signer. Ce n’est pas de cette manière qu’on aide la sélection. Après le match aller, on a recadré les joueurs pour leur demander de se concentrer à 100% sur la sélection. Enfin, le fait que le match soit retransmis en direct et devant beaucoup de journalistes a ajouté de la pression sur les joueurs qui n’ont pas su gérer tout ça en même temps. Vous savez, un jeune adolescent est très sensible à tous ces facteurs.
Comment voyez-vous la suite ?
Ces deux matchs face à la Libye nous ont permis de gagner beaucoup en expérience. Les joueurs se sont rendu compte qu’ils se sont compliqué la situation seuls. Même nous en tant que staff, avons appris de ces deux matchs. La force de cette équipe c’est son assise défensive et on l’a vu au cours des matchs amicaux, mais on n’a pas pu préserver cette force parce que comme par hasard, les joueurs contactés par les clubs sont presque tous des défenseurs. Avec les réseaux sociaux et le téléphone portable, on a du mal à les éloigner de tout ça. Après le match aller, il y a eu un sursaut et le meilleur exemple c’est Tougaï notre défenseur qui avait marqué contre son camp au match aller, mais qui s’est rattrapé de fort belle manière en inscrivant le but qualificatif au match retour. On doit donc mettre à profit la personnalité de cette équipe pour aborder le prochain match dans les meilleures conditions. Sur le plan psychologique, les joueurs sont prêts parce qu’ils savent désormais c’est quoi un match officiel avec la présence des autorités, de la presse, des responsables de la fédération… Sur le plan technique, on doit améliorer nos qualités défensives qui avaient fait notre force, comme l’alignement et le coulissage entre autres. Parce qu’avant la Libye, on avait plutôt mis l’accent sur le travail offensif.
Comment expliquez-vous le grand nombre d’occasions ratées ?
Vous avez, sur le plan offensif on a beau travailler les combinaisons, c’est souvent le talent individuel qui fait la différence. On a de bons joueurs en attaque, mais qui manquent un peu de confiance. Ils ont tellement entendu que la défense encaisse peu, mais l’attaque marque peu qu’ils ont perdu un peu confiance. Et c’est ce à quoi on s’attelle durant les stages et les deux rencontres amicales face à la Tunisie pour les remettre en confiance.
Avez-vous le temps d’améliorer tout ça avant la double confrontation face au Gabon dont le match aller se joue le 6 août ?
Tout dépendra de la concentration et de la capacité d’assimilation des joueurs. S’ils sont concentrés et si leurs parents les éloignent de ces histoires de contrats et autres, on peut être prêts. On jouera deux rencontres amicales supplémentaires. Deux rencontres qui nous permettront d’améliorer plusieurs aspects de notre jeu.
Seriez-vous prêts pour le match face au Gabon ?
Inch’Allah. Normalement, les erreurs commises sur le plan défensif face à la Libye ne se reproduiront pas face au Gabon et offensivement on va essayer de rester sur la dynamique des matchs face à la Libye où on a marqué quatre buts quand même. Il faut que les joueurs enlèvent de leur tête qu’il y a un problème d’attaque, il y a plutôt un problème de concentration et de réussite et la meilleure preuve ce sont les quatre buts inscrits face aux Libyens.
Le Gabon a perdu contre l’Egypte et nous, nous avons battu l’Egypte. Ça peut être jouable, n’est-ce pas ?
Même en faisant abstraction des résultats des rencontres amicales, ce sera jouable pour nous. Nous avons un bon groupe en progression constante, un groupe capable d’aller loin. Nous avons les moyens d’affronter les meilleurs pour peu que les joueurs restent concentrés pour éviter les erreurs commises face aux Libyens. Personnellement, à cet âge-là je ne focalise pas trop sur les équipes adverses, je préfère me concentrer sur mon équipe car j’ai des gamins capables de tenir tête aux meilleurs. Si les joueurs sont concentrés et bien en place, ils peuvent faire quelque chose.